Publié par : reopen911 | septembre 20, 2008

L’humanité Dimanche: Après les attentats du 11/9 – Pourquoi l’Amérique doute ?

par Marc de Miramont pour l’Humanité Dimanche, paru le 14 septembre 2008

Phénomène impensable au lendemain du 11 Septembre, de plus en plus d’Américains ne croient plus en la vision restreinte et en la version officielle des attentats qui ont changé la face du monde. Les mensonges sur les armes de destruction massive, prétexte à une guerre meurtrière, et le travail d’une commission d’enquête controversée ont largement contribué à semer le doute.

Faut-il rouvrir le « Dossier » du 11 Septembre 2001? Vu de France. La question paraîtrait presque saugrenue, tant le débat sur les attentats qui ont bouleversé la face du monde est englué, depuis les ouvrages d’un certain Thierry Meyssan (1), dans les méandres des théories du complot, d’accusations d’arrière-pensées anti-américaines, voire pire, antisémites (2). Tant, aussi, les questions dérangeantes ont été portées, dans la sphère médiatique tout du moins, par des personnalités publiques peu au fait du « dossier » et des enjeux complexes liés à la « guerre mondiale contre le terrorisme » : l’actrice Marion Cotillard a assimilé ses doutes vis-à-vis de la version officielle aux fantasmes sur la mort de Coluche (un « assassinat » suggère-t-elle) et aux illuminés qui prétendent que personne n’a marché sur la Lune. La ministre du Logement Christine Boutin, interrogée en novembre 2006 sur la complicité éventuelle du gouvernement Bush, lâchait quant à elle cette phrase, frappée du bon sens populiste: « Je pense que c’est possible. Je sais que les sites qui parlent de ce problème ont les plus gros taux de visites (…). Cette expression de la masse ne peut pas être sans aucune vérité. »

Pourtant, loin des habituels tenants de la « théorie du complot », il est indéniable qu’un nombre croissant d’hommes politiques (républicains, et démocrates), d’universitaires, de scientifiques, d’ingénieurs, de pilotes et de professionnels du renseignement disent ne plus croire que les pirates de l’air aient pu agir sans complicités internes ou externes.

Trois prétendants à l’élection présidentielle (la « verte » Cynthia McKinney, le démocrate Dennis Kucinich, le républicain Ron Paul) ont promis, en cas de victoire, la réouverture de l’enquête. D’anciens ministres européens (Michael Meacher en Grande-Bretagne, Andreas Von Bülow en Allemagne), des eurodéputés (l’italien Giulietto Chiesa) ont publiquement apporté une caution « politique » à des thèses considérées comme farfelues. Des dirigeants en exercice (Hugo Chavez, Mahmoud Ahmadinejad…), des officiels russes (comme l’ancien chef d’état-major des armées Leonid Ivashov) ont aussi relayé la thèse du « terrorisme manipulé », manière de renvoyer les États-Unis à leur propre propagande, et accessoirement de régler leurs comptes avec l’ »axe du bien ». Outre-Atlantique, des « figures » du spectre politique ont fait la même analyse. « Comment les contrôles de sécurité des aéroports ont-ils pu être défaillants quatre fois en quelques minutes, [est-il possible] que des pirates de l’air qui étaient de piètres pilotes aient réussi des manœuvres aériennes que même des pilotes de chasse chevronnés se déclarent incapables d’accomplir ? » s’interroge Paul Craig Roberts, ancien sous-secrétaire d’État au Trésor (administration Reagan). « Certes il reste la possibilité, aussi improbable soit-elle, qu’Allah ait doté les pirates de l’air d’une chance inouïe … Nous savons également, ajoute-t-il, que l’administration Bush a envisagé de mener des opérations sous fausse bannière. »

Deux exemples parmi d’autres: à deux mois du lancement de la guerre en Irak, George W. Bush, doutant fortement que les inspecteurs de l’ONU découvrent la moindre trace d’armes de destruction massive, réfléchissait à l’envoi d’appareils U-2 américains « déguisés » en avions des Nations Unies pour survoler l’espace aérien irakien, en espérant une riposte de Saddam Hussein susceptible de déclencher le conflit (3). Plus récemment, au mois de juillet, le célèbre journaliste américain Seymour Hersh révélait comment, selon ses informations, le vice-président Dick Cheney prévoyait de faire construire de faux bateaux iraniens dans les chantiers navals américains et d’ouvrir le feu sur la propre flotte de la Navy, afin de précipiter la guerre avec l’Iran. L’opération, même si elle a été abandonnée de justesse parce qu’elle aurait couté la vie à des soldats américains, révèle les possibles « manipulations » aujourd’hui discutées au plus haut niveau de la Maison-Blanche. Un cynisme que Karl Rove, ancien stratège de George W. Bush, avait ramassé dans une célèbre formule : « Nous sommes un empire maintenant. Et lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité. » (4)

Impensable pour de nombreux Américains au lendemain du 11 Septembre, la sincérité du gouvernement dans sa lutte contre Al-Qaïda est aujourd’hui discutée à voix haute. Une coalition de « whistle-blowers »(5), réunissant des agents du renseignement américain réduits au silence par l’administration Bush, s’est formée autour de l’ex-traductrice du FBI Sibel Edmonds, pour revendiquer leur droit à démontrer les dérives de la « guerre contre le terrorisme » et les failles dans la sécurité nationale. Certains ont le verbe plus libre : « Je suis forcé d’admettre« , a écrit l’ancien officier de renseignement du corps des marines Robert Steele, « qu’au minimum on a laissé se produire le 11 Septembre afin de servir de prétexte de guerre. » D’autres, comme l’ancien analyste de la CIA (sous George Bush père) Ray McGovern, l’ancien agent de terrain Robert Baer ou l’ancien directeur du bureau d’analyse politique de la CIA William Christison, arrivent à des conclusions similaires. « Toute l’histoire officielle du 11 Septembre n’est qu’une série de mensonges, et la politique américaine, intérieure comme extérieure, s’est basée sur ces mensonges« , affirme ce dernier.

Le rapport officiel de la commission d’enquête sur les attentats, publié le 22 juillet 2004, n’a rien fait pour dissiper les doutes. Pilotée par la Maison-Blanche, l’enquête dirigée par Philip Zelikow, un proche collaborateur de Condoleezza Rice, a systématiquement évité les questions dérangeantes et les témoins contredisant les déclarations de George W. Bush, Dick Cheney ou Donald Rumsfeld. À la sortie du rapport, les voix du sénateur Max Cleland, qui a quitté la commission en raison du refus répété de l’administration Bush de collaborer à l’enquête, ou celle du sénateur démocrate Mark Dayton, qui a fustigé la gravité des mensonges répétés du Pentagone, n’ont guère troublé une Amérique plongée dans le duel électoral George Bush-John Kerry et divisée sur la question de la guerre en Irak.

« Il existe tellement de lacunes dans les thèses officielles sur le 11 Septembre qu’il n’en reste aucune synthèse vraisemblable et cohérente. Et jusqu’à ce jour, nous avons continué à tituber de l’avant comme si la vérité sur ces événements traumatisants ne présentait plus d’intérêt « , écrit Richard Falk, professeur émérite de loi internationale à l’université de Princeton, nommé cette année rapporteur spécial de l’ONU dans les territoires palestiniens (6).

Nombre de familles de victimes des attentats, qui réclament elles aussi une nouvelle enquête, attendent en vain une véritable réponse judiciaire pour enfin tourner la page. Comprendre pourquoi sept ans après, malgré les promesses initiales de Colin Powell ou de Tony Blair, deux invasions, en Irak et en Afghanistan, justifiées par le 11 Septembre, Oussama Ben Laden n’est toujours pas officiellement inculpé par le FBI. Khalid Cheikh Mohammed, le cerveau présumé, est actuellement jugé devant un tribunal militaire, après avoir avoué sa culpabilité sous la torture, ainsi que sa participation à 17 opérations terroristes dans le monde. Sans procès, à l’ombre du droit international, des individus suspectés de « terrorisme » disparaissent dans l’archipel des prisons secrètes de la CIA, y compris en Europe (7).

L’absence de véritable procès et d’enquête impartiale autour de cet événement fondateur a certes donné la fièvre aux théoriciens du complot ainsi qu’aux extrémistes de tout poil. Chacun, dans les nombreuses zones d’ombre de la version officielle, y construit sa propre histoire ou y introduit ses propres fantasmes. Le grand historien américain Howard Zinn (NdT : lire ci-dessous), tout en soutenant l’idée d’une nouvelle enquête, craint qu’on ne connaisse jamais la vérité. Si l’histoire du terrorisme d’état lui donne probablement raison, rien ne devrait empêcher, dans une démocratie, de poser des questions.

(1) Dans un ouvrage vendu à plus de 300 000 exemplaires en 2002, le président du Réseau Voltaire, Thierry Meyssan, affirmait qu’aucun avion de ligne ne s’était écrasé sur le Pentagone.

(2) « Marion Cotillard et les complots » par le « philosophe » Robert Redeker « le Monde », 29 mars 2008.

(3) « Le deal Bush-Blair révélé dans un mémo secret », « The Guardian », le 3 février 2006.

(4) « Foi, certitude, et la présidence de George W. Bush », par Ron Suskind, « New York times », 17 octobre 2004.

(5) Quelqu’un qui « informe » de l’intérieur.

(6) En préface du livre de David Ray Griffin « Le Nouveau Pearl Harbor« , publié aux éditions Demi-Lune.

(7) « L’archipel des prisons secrètes de la CIA », par Giulietto Chiesa, « le Monde Diplomatique », août 2008.


Encadré :

LE 11 SEPTEMBRE 2001
UNE « OPPORTUNITÉ EN OR » POUR L’ADMINISTRATION BUSH
PAR HOWARD ZINN, HISTORIEN AMÉRICAIN, AUTEUR DU SEST-SELLER
« UNE HISTOIRE POPULAIRE DE l’AMÉRIQUE »

Les mensonges de l’administration Bush sur les armes de destruction massives, le travail bâclé de la commission d’enquête sur le 11 Septembre, et plus généralement sur le fait que cette administration soit probablement la plus secrète de l’histoire américaine ont contribué à semer le doute.

Beaucoup d’intellectuels américains ne soutiennent pas ceux qui affirment que le gouvernement a délibérément organisé les attaques du 11 Septembre, mais ils accueillent la version officielle avec beaucoup de scepticisme et constatent avec raison que cet événement a été utilisé pour atteindre d’autres objectifs que la lutte contre le terrorisme. Indéniablement, les « grands médias » ont lamentablement couvert cet événement et ont applaudi presque aveuglément a la « guerre contre la terreur », aux invasions de l’Irak et de l’Afghanistan. De manière certaine, ces attentats ont constitué une opportunité en or pour l’administration Bush afin d’étendre la puissance américaine au Moyen-Orient, de mener a bien le projet de bouclier antimissile et de restreindre les libertés individuelles. Je soutiens évidemment toute enquête pour en savoir plus, même si je ne pense pas que les énergies devraient se concentrer sur cette issue. La question de savoir si l’administration Bush a participé ou non à ces attentats ne sera probablement jamais tranchée. Alors que la manière dont ces attentats ont été utilisés, la fausse « guerre contre la terreur » et les invasions injustifiées ont davantage de chances de réveiller et de mobiliser la population américaine.

 


Notes de ReOpenNews

Cet article de l’Humanité Dimanche constitue une première dans la presse nationale française, et ReOpen911 remercie ce journal pour son approche objective et équilibrée, exposant simplement, sans passion et de façon factuelle les raisons du questionnement légitime sur le 11 Septembre.

En effet, malgré quelques rares initiatives récentes comme celle de David Abiker sur France-Info, ou le débat organisé par France-24 – avec les conséquences que l’on sait pour le journaliste de de la chaine qui l’a organisé – il faut bien reconnaître que le thème du 11/9 en France est soit totalement ignoré, soit mentionné comme l’œuvre de révisionnistes (voire négationnistes) ou de conspirationnistes pressés de désigner les coupables dans l’administration américaine. De fait il faut aller lire la presse étrangère comme Le VIF (L’Express en Belgique), la Tribune de Genève ou l’Hebdo en Suisse, la presse italienne qui a d’une manière générale plébiscité le film ZERO de l’euro-député Giulietto Chiesa, le Monde Diplomatique en Norgève, BBC News en Angleterre, le Deutch Welle en Allemagne, ou encore la télévision russe qui a diffusé ce même film ZERO, pour mesurer l’ampleur du mouvement pour la vérité sur le 11/9 de ce côté-ci de l’Atlantique, ou du moins connaitre son existence et ses objectifs, à savoir la réouverture d’une enquête internationale et indépendante sur le 11 Septembre.

Jusqu’à présent, seuls certains sites d’information dits « alternatifs » comme Rue89, AgoraVox, ou ContreInfo osaient publier des articles invitant au débat sur ce sujet. Souhaitons désormais que d’autres grands médias français s’inspirent de cette initiative historique de l’Humanité DImanche et se décident enfin à relayer au niveau national les questions légitimes et pacifistes de centaines de milliers de citoyens sur le 11 Septembre 2001. Il en va de la crédibilité des médias français et de l’équilibre de ce 4ème pouvoir dont nos démocraties ne peuvent se passer.


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